Châtillon-en-Diois

· Châtillon en Diois est un village médiéval blotti au pied du Glandasse, (2041m), (falaises les plus méridionales du Vercors), au seuil de la Provence. Il marie, sous le même ciel, les charmes de la montagne et les avantages d'un climat ensoleillé. ·

Les trois clochers surmontent l'Eglise St Julien (XVIIIe), le Temple (XVIIIe- XIXe), et la tour de l'horloge (XVIIIe).

HISTOIRE DU TEMPLE DE CHÂTILLON-EN-DIOIS

 

Après la signature de l'Edit de Nantes en 1598, les Protestants pouvaient, faute de mieux, célébrer le Culte dans un local loué par la commune, mais ils attendaient avec impatience un temple, qui ne fut construit qu'en 1610. Malheureusement les persécutions ayant repris, le Parlement de Grenoble en 1683, deux ans avant la révocation de l'Edit de Nantes, ordonna par un arrêt la démolition du temple. 109 ans après, en 1792, la liberté des cultes étant retrouvée, on entreprit la reconstruction du temple actuel, mais les travaux avançant trop lentement au gré des Protestants, ceux-ci firent une pétition pour obtenir l'autorisation de partager l'usage de l'église avec les Catholiques. Bien que favorables à une telle décision qui symbolisait la Tolérance universelle et la fraternité entre leurs concitoyens, les conseillers refusèrent de donner l'autorisation considérant qu'il valait micux cn éviter les inconvénients susceptibles de troubler paix et union qui régnaient entre eux. En compensation les Protestants purent user de la cloche du Beffroi pour appeler les fidèles au Culte et la commune prit en charge les travaux d'achèvement du temple. En 1842, on ajouta les tribunes, et une cloche en 1847. Il possède une grande salle voûtée.L'ancienne entrée, à l'opposé de la porte actuelle,a donné son nom au "Viol du temple", une des ruelles étroites et caractéristiques de Châtillon. La façade du monument, percée de quatre baies côté levant, donne une belle luminosité à l'ensemble de l'édifice.

Le beffroi, édifié au 16è siècle,présente en façade un décor géométrique peint et à l'intérieur, dans la montée d'escalier, des fresques à motifs floraux. Sa cloche appelait , au 18è siècle, les protestants au culte jusqu'à ce que leur nouveau temple fut achevé...

Les condamnés aux galères de Châtillon

ACHARD ou LACHARD ou PAULCHARD, Paul. Né vers 1717, fils de feu Paul et Victoire Magnan; cordonnier de Châtillon-en-Diois (26410). (voir si frère de Louis ) Condamné à Grenoble pour enlèvement de prédicant, le 9 février 1745, marqué G.A.L. au fer rouge à Die. Un des derniers galériens libérés, le 11 octobre 1775.

EYMERIC ou AIMERY ou EYMERY, Jean-Jacques. Né vers 1701, fils de feu Pierre et feue Jeanne Lutier, époux d'Elisabeth Romangal ; chapelier. De La Baume-des-Arnaud (05019). Condamné à Grenoble à 5 ans pour assemblée, le 2 avri11746. Libéré le 8 avri1 1751.

TOUREIL ou TUREL, Pierre. Né vers 1661, fils de Claude et Marthe Vassière ; cardeur. De Châtillon-en-Diois (26410). Condamné en Dauphiné comme Vaudois, le 10 décembre 1689. Mort à l'hôpital le 10 juillet 1690.

AUDIBERT, Pierre. Faiseur de bas. Arrêté à Châtillon. De Nîmes (30000). Condamné à Montpellier le 16 septembre 1693. -

Michel TRUC, dans son livre: Petite histoire de Châtillon en Diois, a écrit : ...il faut ajouter, et c'est tout à l'honneur des Châtillonnais, qu'à quelque confession qu'ils appartinssent, ils vécurent toujours en bonne intelligence. Jamais aucune persécution ne fut l'œuvre des habitants du village.

Le 19 ou 20 janvier, le curé de Châtillon, apprenant que le pasteur Roland était dans une maison du bourg, auprès d'un malade, ameuta les paysans contre lui et le fit saisir au collet. Mais le cordonnier Paul Achard l'arracha de leurs mains. Aussitôt trois ou quatre brigades d'archers, accompagnées d'un détachement de soldats, se rendirent à Châtillon et s'emparèrent d'Achard , que le parlement condamna peu après (9 février) aux galères perpétuelles et qui fut flétri à Die. Les archers arrêtèrent plusieurs autres personnes de Châtillon, notamment Jean -Jacques Eymerie, et de là allèrent à Vinsobres, où ils se saisirent de beaucoup de protestants qui revenaient d'une assemblée.

Charles Monod, pasteur issu d'une illustre famille, est pasteur à Châtillon-en-Diois de. 1928 à 1936 Dès la déclaration de la guerre, installé à Cannes, il aida les réfugiés étrangers et les juifs à Cannes et dans les Alpes-Maritimes en leur procurant de fausses cartes d'identité et de faux certificats de baptême. Charles Monod est aidé par l'abbé Tondre, de la Drôme. Condamné avec le pasteur Ramette pour avoir rédigé de faux certificats de baptême, il quitta Nice et trouva refuge à Marseille.

Charles Westphal (1896-1972)Pasteur de l'Église Reformée de France, esprit aigu et d'une grande finesse. Charles Westphal laisse le souvenir d'un homme d'un grand rayonnementspirituel et d'une solide culture littéraire.Après un premier poste pastoral à Châtillon-en-Diois dans la Drôme, il devient en 1929 Secrétaire Général de la Fédération Française des étudiants Chrétiens, la Fédé, succédant au pasteur Pierre Maury, qu'il marque de son ouverture vers l'œcuménisme et de sa grande culture littéraire. Il était un lecteur assidu de Kierkegaard et un grand admirateur de Claudel. Après un intérim à l'Église réformée de Pentemont (Paris) il est nommé à Grenoble où il a la charge d'un ministère d'enseignement et de formation théologique des laïcs de 1939 à 1945. C'est là , alors qu'il aide des étudiants choisissant le maquis et la résistance et de nombreux juifs désirant passer en Suisse, qu'il crée les Cahiers d'Études Juives.

Un soir de vogue à Châtillon en Diois dans la tourmente

Cette nuit-là, un peu avant deux heures, venue en tapinois sur la Placette, une forme noire se glissait avec précaution vers la maison Turel. C'était un homme de haute taille, coiffé d'un bonnet noir, enveloppé d'un long manteau, dans les plis duquel il dissimulait une lanterne sourde. Il s'assura d'abord que la place était vide, puis vint frapper doucement au volet de la chambre du rez-de-chaussée où dormait le vieux Turel. Au bout d'un moment, une lumière filtra des fentes du contrevent. -Qui est là ? demanda le vieillard. L'homme répondit : -C'est moi, Gaude, le curé. Ouvre ta fenêtre, Moïse, j'ai à te parler sans témoins. Turel obéit. -Ah ! c'est toi, François ? Eh! dis-moi, quelle affaire ? ... -Chut! Que personne au moins ne sache que je suis venu ! Voici ce qui m'amène: Mgr l'Evêque a obtenu de l'intendant du Dauphiné qu'une compagnie des grenadiers qui sont à Die viendrait tout à l'heure, au petit jour, à Châtillon, pour y surprendre les enfants des protestants les plus mauvais, et les mener aux Ursulines ou à l'hôpital de la Foi. On pense qu'ils seront tous là à cause de la vogue. Or, ta petite Esther est sur la liste. Je t'avertis. Adieu !... Suffoqué par l'émotion, Moïse balbutiait des mots sans suite. -Ne me remercie pas, ajouta le prêtre, car je suis dans l'angoisse; voilà deux heures que se débat ma conscience et que je cherche où est mon devoir... -Que le Seigneur t'assiste, François, murmura Turel. -Adieu, adieu! fit Gaude, pas de paroles inutiles ! Et le curé avait déjà tourné les talons quand il se ravisa et revint vers la fenêtre. -Moïse, Moïse! appela-t-il à voix sourde, écoute encore ; autant te le dire aussi: on est sur les traces de ton fils, le prédicant ; on sait qu'il gîte dans les parages de Quint avec Jacques Roger ; on croit aussi qu'il amena avec lui, de Genève, un jeune pasteur très dangereux, lequel se cacherait, dit-on, à Châtillon -tu sais peut-être où! -et on va faire des recherches dans le bourg... -Ah ! murmura Turel, bouleversé, ton évêque nous prépare une belle vogue! Mais comment pourrai-je, François, te dire mon merci ? -Comment ? répondit le curé... Ah ! tu le sais bien, Moïse, mais tu ne le feras jamais. Ton endurcissement est trop vieux aujourd'hui. Et je n'aurai pas cette joie que tu viennes à la vérité !... Et le curé Gaude disparut dans l'ombre, cependant que le vieux Turel se vêtait à la hâte, pour courir ensuite, de chambre en chambre, alerter toute la maisonnée. (Pierre DÉVOLUY La Cévenne embrasée Sous la Croix)